Diabète de l'enfant : impliquer les officinaux dans le suivi pour un meilleur contrôle glycémique

le 25/02/2015 à 17h39 par  - Lecture en 4 min Ajouter à votre selection
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Une expérience de télémédecine destinée à intensifier le suivi des enfants diabétiques en impliquant le pharmacien d'officine ne s'est pas soldée par les résultats escomptés en matière de contrôle de la maladie, mais certains ajustements pourraient faciliter la mise en oeuvre de cette stratégie et la rendre plus efficace, rapportent les membres de l'équipe lyonnaise ayant évalué cette stratégie dans "Diabetes & Metabolism".

Le contrôle de la glycémie semble plus difficile à atteindre chez les enfants et adolescents diabétiques que chez les adultes , notamment parce qu'ils relâchent souvent leur surveillance pendant les trois mois qui séparent deux consultations successives chez le diabétologue, a expliqué à APM Santé le Dr Claire-Lise Gay, du service d'endocrinologie pédiatrique de l'hôpital Debrousse (Hospices civils de Lyon, HCL), qui a conduit cette étude. Cette expérience a donc visé à renforcer le suivi de ces jeunes malades en les mettant en contact avec un interlocuteur de proximité et en les obligeant, entre deux consultations avec un spécialiste, "à montrer leurs résultats à quelqu'un qui s'y connaît et qui peut avoir un oeil sur leurs glycémies" , a-t-elle précisé. Dans la mesure où les diabétiques doivent se rendre chaque mois chez leur pharmacien pour se procurer les médicaments et le matériel, l'équipe lyonnaise a jugé intéressant d'impliquer les officinaux dans cette approche. Cent jeunes patients -âgés de huit à dix-sept ans, souffrant d'un diabète de type 1 depuis plus d'un an et présentant un taux d' hémoglobine glyquée (HbA1c) supérieur ou égal à 8%- ont été inclus dans cette étude. Les pharmaciens chez lesquels ils avaient l'habitude de se rendre ont été sollicités par l'équipe médicale du service d'endocrinologie pédiatrique, pour savoir s'ils accepteraient d'être équipés d'un logiciel permettant de télécharger les données du suivi de la glycémie enregistrées dans les glucomètres des participants, de calculer automatiquement les moyennes et de permettre l'impression des résultats. La moitié des jeunes participants a simplement bénéficié d'un "suivi classique" , consistant en une consultation trimestrielle avec un diabétologue. Les autres jeunes malades se sont vus proposer un "suivi renforcé" : ils devaient se rendre tous les quinze jours chez leur pharmacien, pour transférer les données enregistrées dans leur glucomètre dans le logiciel, de façon à ce que l'officinal puisse ensuite faxer les résultats à l'équipe hospitalière. Après avoir analysé ces données, le diabétologue suivant l'enfant lui fournissait en retour des conseils destinés à l'aider à améliorer son équilibre glycémique, par mail ou par téléphone, dans les cinq jours. Au total, 87 officines ont participé (44 en "suivi classique", 39 en "suivi renforcé" et quatre prenant en charge des jeunes malades des deux groupes de suivi). Au bout de six mois, la valeur moyenne du taux d'hémoglobine glyquée n'est pas apparue significativement différente entre les deux groupes (9,12 en moyenne chez les 36 enfants du groupe "suivi renforcé" pour lesquels les données étaient disponibles et 9,27 en moyenne chez les 35 du groupe "suivi habituel" ), mais "la télémédecine implique un changement des habitudes des patients et des médecins et un délai de six mois pourrait donc être trop court pour véritablement juger de l'impact de cette expérience" , tempèrent les chercheurs lyonnais. En outre, pour les auteurs, diverses difficultés de mise en place -avec notamment des problèmes pour l'installation du logiciel dans les officines- ainsi qu'un défaut d'adhésion à l'intervention -à la fois au niveau des enfants, des pharmaciens et des médecins- pourraient également, au moins en partie, expliquer ce résultat. "Ce suivi renforcé n'a pas prouvé sa supériorité au suivi habituel dans les conditions utilisées, mais de nombreuses améliorations sont envisageables pour le rendre plus faisable et probablement plus efficace" , concluent-ils. Parmi les pistes à explorer pour améliorer ce programme, ils citent notamment une simplification de la transmission des données (en utilisant un logiciel "universel" compatible avec tous les types de glucomètres et tous les ordinateurs) et l' élargissement de l'éventail des données télétransmises aux équipes de diabétologie (non seulement les glycémies, mais aussi des informations concernant les horaires des repas, les doses d'insuline injectées, l'activité physique...). Alors que "cette étude a permis d'exploiter la relation avec les pharmaciens, jusqu'ici pas du tout impliqués" , il pourrait être intéressant de "relancer une enquête comparable" , a expliqué le Dr Claire-Lise Gay à APM Santé, en précisant que son équipe conduit une phase de réflexion et de concertation à ce sujet. Il faudrait alors plus travailler en amont, en organisant des réunions de formation pour les pharmaciens sur le diabète de type 1 et les enjeux de sa prise en charge, voire créer et développer un réseau plus formel, a-t-elle suggéré. La praticienne lyonnaise a également signalé le lancement d'une expérience de télémédecine comparable, mais impliquant cette fois-ci des infirmières. Les jeunes malades se verront alors proposer, au cours du trimestre qui sépare deux consultations chez le diabétologue, une rencontre mensuelle et un contact téléphonique tous les quinze jours avec une infirmière spécialisée et ce, pendant un an. Les premiers résultats de cette étude (neuf mois d'inclusion, un an de suivi) devraient être disponibles d'ici quelques temps, a précisé le Dr Claire-Lise Gay. (Diabetes & Metabolism, avril 2006, vol. 32, n° 2, p. 159-165)

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